Bonjour à toi Marie, ainsi qu’à ta belle et grande famille,
..et un grand merci à ta maman Clotilde pour son si joli livre que ma maman à moi a adoré.
Toi, Marie, tu es « tombée du nid ». Moi, je suis arrivée « telle un papillon sur une fleur » ! On m’a appelée Victoire, et tu vas vite comprendre pourquoi !
Mon papa, c’est Laurent, et ma maman, Ophélie. Tous les deux, ils en ont pas mal bavé pendant de nombreuses années pour avoir ma sœur Lucie et mon frère Jules. Par conséquent ils ne s’attendaient pas, mais alors vraiment pas à avoir un petit « troiz », sans même un nouveau coup de pouce de la médecine ! Moi, la petite dernière, je suis donc une vraie coquine : depuis le tout début, je me suis amusée à faire de drôles de surprises à papa et maman. Laisse-moi te raconter comment ça s’est passé, Marie :
Un jour, maman fait un test de grossesse, car elle se trouve toute bizarre. Et là, stupéfaction : je m’étais lovée au creux de son ventre, depuis quand même un mois et demi ! Tu aurais dû voir la tête éberluée de mes parents ! Comme ils disent, leur « petit miracle » grandissait, et ce miracle, c’était moi.
A la première échographie, je gigotais dans tous les sens, tout allait très bien, y compris ma clarté nucale, mais cependant papa et maman ont quand même été poussés à faire une prise de sang, à contrecœur. Et alors que maman était dans son 4ème mois de grossesse, le gynécologue lui a dit qu’il fallait absolument faire une amniocentèse à cause des résultats de la prise de sang qui n’étaient pas bons. Ma maman avait déjà vécu cet examen pour ma grande sœur, et elle avait eu inutilement très peur à l’époque (elle avait même été piquée deux fois), alors qu’à la sortie tout allait très bien. Du coup, trois ans plus tard, mes parents avaient refusé tout net de faire à nouveau une amniocentèse pour mon grand frère.
Mais là, me concernant, le gynécologue a déballé un tel discours de morale à ma maman, seule ce jour-là, lui expliquant qu’une trisomie coûterait très cher à la société (!), qu’il n’était pas pensable d’imposer ça à la fratrie (!), tout ça tout ça, qu’elle a cédé. Elle regrette. Cette discussion la met encore en colère aujourd’hui, rien que d’y repenser. Mais papa et maman m’aimaient déjà tant qu’ils ont décidé que – trisomie ou pas – je resterais là, bien au chaud, jusqu’à ma naissance. La grossesse s’est donc poursuivie avec des échographies plus poussées, mais pourtant tout allait bien, c’était rassurant.
Le 30 octobre 2014, je suis arrivée avec mon petit chromosome en plus. Les premiers mois ont été difficiles. Dès l’annonce, et pendant plusieurs mois, ma maman a beaucoup pleuré, mais mon papa était là, au top. Il la rassurait, lui disait que ça allait aller. Il a souvent essuyé ses larmes, l’a aidée à remonter la pente quand elle se sentait flancher. Il l’a même encouragée à me nourrir au sein parce que c’était ce qu’il y avait de meilleur pour moi (et ce n’était pas chose facile parce que je ne faisais que dormir !). Tu vois, mon papa et ma maman, cela fait dix-neuf ans qu’ils s’aiment comme ça, fais le calcul !
Maintenant maman est folle de moi et se rend bien compte que ce petit truc en plus, c’est de l’Amour. Comme un bonus. Elle est si heureuse et reconnaissante que ce soit eux que j’aie choisis comme parents ! Je suis super bien entourée avec une grande-sœur et un grand-frère qui sont géniaux, des grands-parents, des tontons, des tatas, des cousins et des cousines pleins d’amours. Je les fais tous fondre avec mes yeux magiques.
Je suis aussi suivie par les trois spécialistes habituels : une kiné, une psychomotricienne et une orthophoniste. Papa et maman veulent faire tout leur possible pour que je sois le plus autonome possible, et il faut voir tous mes efforts et mes progrès ! J’ai une cardiopathie dont je dois être opérée, mais à part ça je mange très bien, je suis très sage et maman m’allaite encore un peu en complément.
Alors Marie, comprends-tu maintenant pourquoi mes parents considèrent que je suis un « cadeau de la vie », et pourquoi ils m’ont appelée Victoire ? Une victoire sur la vie, une victoire de l’amour.
Bisous à toi, Marie, et bisous à tous
Ta Victoire