Boîte à outils

Gladys

Petite Marie, je m’appelle Gladys, ma maman te connait virtuellement déjà depuis que tu es petite. Elle avait pu voir lors d’un reportage à quel point ta famille et toi, vous étiez génialissimes. Cela fait un moment qu’elle se rend compte que moi aussi je suis un petit oiseau.
Je suis née paisiblement le 22 février dans une grande famille de 2 frères et 2 sœurs. J’avais des yeux en amande délicieux, une petite bouche en cœur, de longs cheveux noir ébène, et une toute petite voix de poussin.
Mon premier cri mit longtemps à arriver, comme s’il se frayait difficilement un chemin dans la gorge.
Le soir, après les soins, ma maman m’avait entendue me débattre dans mon petit couffin. En me regardant, j’étais devenue toute rouge et semblait manquer d’air, puis j’étais revenue à moi. Les sage-femmes avaient rassuré maman, selon elles j’évacuais le liquide amniotique
ingéré lors de l’accouchement. Les heures qui ont suivies furent les plus belles, les plus douces, et nous avons profité l’une de l’autre maman et moi. Le calme avant la tempête qui…
Et puis ce moment était arrivé sournoisement, sans que maman ait eu le temps de s’y préparer. Une équipe médicale est entrée dans ma chambre. Ma maman n’avait pas remarqué tout de suite mais le médecin avait un papier à la main. Elle ne se rappelle plus des premiers mots, mais de leurs visages gênés et crispés. Les seuls mots qu’elle a assimilé à ce moment-là se résumaient à ” particularité”, “yeux en amande”, “hypotonie”, “pli palmaire unique” et une autre phrase : “suspicion de trisomie 21”.
La pédiatre lui a tendu ce fameux papier à signer pour autoriser un prélèvement sanguin afin de déterminer mon caryotype.
Le soir même j’ai eu une crise plus longue que la précédente : il s’agissait en fait de noyades suite à des fausses routes. Je fus dans les heures qui ont suivies, transportée par le SMUR en réanimation néonatale à la maternité régionale dans un état critique. Il s’en est suivi pour moi plusieurs semaines de combat , j’avais notamment des problèmes respiratoires et d’alimentation, avec des montagnes russes pour mes parents.
Entre ma maman trop inquiète et mon papa trop optimiste, ils ont trouvé un bon équilibre pour se soutenir dans cette épreuve inattendue. Ils n’ont eu de cesse de se relayer à mon chevet pour ne jamais me laisser seule affronter ces épreuves, attendant désespérément qu’un médecin leur dise ce que j’avais.
Un matin ce fameux appel tant attendu, et en même temps tant redouté, sonne sur le téléphone de maman. Elle était auprès de moi, toujours en réanimation.
Maman a tout de suite compris qu’ils avaient trouvé et la journée fut très, très longue pour elle. J’étais porteuse du syndrome de la microdélétion 22q11, également appelé syndrome de Di-George.
Maman était ce soir, et contre tout attente, enfin sereine. La vie serait sans doute une série de batailles, mais elle serait belle quoi qu’il arrive. Elle avait confiance en sa famille et surtout en moi. Avoir posé un nom sur ma maladie a été une délivrance pour mes parents.
Aujourd’hui j’ai 10 mois, j’ai passé une bonne partie de ma vie à l’hôpital mais j’évolue formidablement bien, notamment grâce à l’amour débordant (parfois étouffant) de ma fratrie. La vie est belle quand on est aimé, n’est ce pas le plus important ?
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