Chère Marie,
Voilà plusieurs mois que je veux t’écrire mais ma maman et mon papa ont souhaité prendre tout leur temps afin de pouvoir apprécier chaque minute du bonheur qui leur est tombé sur la tête au début de l’année et qu’ils avaient tant attendu. Ce bonheur, c’est moi : Augustin.
Pendant ces grandes vacances, nous avons eu un peu de temps pour nous poser et mon papa s’est enfin décidé à prendre sa plume pour te raconter ma vie (ou plutôt mes vies) de petit bonhomme extra-ordinaire.
Extra-ordinaire, car comme toi je suis né avec un petit chromosome en plus, ce qui fait tout mon charme.
Mes frères me disent que je suis «très-unique» (21)
Extra-ordinaire encore, car malgré mon jeune âge (je viens de souffler ma première bougie), je suis déjà né deux fois. Ma première naissance était un matin d’été 2016. Je dois t’avouer que je ne me souviens pas de tout, si ce n’est que j’ai tout de suite senti que mon arrivée sur cette terre allait bouleverser bien des vies. Tu le sais, Marie, notre différence peut faire peur, au point que mes parents biologiques ne se sont pas sentis capables de m’accueillir. Ce n’est pas l’amour qui leur manquait, mais certains “obstacles” peuvent paraître insurmontables. Toi et moi, Marie, nous savons bien que nous n’avons pas à porter de jugement. Nous devons simplement remercier nos premiers parents de nous avoir donné la vie.
C’est donc dans ces circonstances un peu particulières que j’ai été chouchouté par tout le personnel de l’hôpital au cours des premiers jours de ma première vie. Puis, ce fut au tour du personnel de la pouponnière de prendre le relais. Pendant cinq mois, j’ai été choyé, dorloté, cajolé par une petite armée de fées aussi attentionnées qu’attendries par mon histoire et ma petite bouille toute ronde.
Mon premier Noël, je l’ai donc passé avec mes copains de la pouponnière. C’était une belle fête mais plus le temps passait et plus je sentais qu’il me manquait quelque chose d’essentiel : un papa, une maman et pourquoi pas des frères et sœurs… Moi aussi, j’avais le droit de rêver !
En réalité, cette année, le Père Noël avait juste un peu de retard puisque, quelques jours plus tard, ma fée préférée de la pouponnière s’est penchée sur mon lit pour m’annoncer la nouvelle que j’attendais tant : l’arrivée d’une maman, d’un papa… et de quatre grands frères !
Dès le lendemain matin, ils étaient là ! Je naissais donc pour la seconde fois entre les bras de ma maman et de mon papa. Notre rencontre a été si forte en émotions qu’il n’existe pas de mots assez puissants pour décrire ce que chacun de nous avons ressenti. Et très égoïstement, je dois t’avouer que je souhaite garder ces moments pour moi tout seul. Ce sera mon petit jardin secret.
Ce qui est sûr, c’est que je n’étais pas le seul à être heureux et ému. Mes parents ont versé des litres et des litres de larmes, au point que nous étions à la limite de devoir déclencher une alerte inondation ! Et même mes petites fées de la pouponnière n’ont pas résisté à cette émotion, trop heureuses de savoir qu’une nouvelle vie remplie d’Amour allait commencer pour moi.
Après quelques jours d’adaptation à la pouponnière, j’avais décidé de définitivement adopter cette maman et ce papa qui me plaisaient bien. Nous sommes donc partis rejoindre ma nouvelle maison et j’ai enfin pu rencontrer mes quatre grands frères. Cela faisait presque un an et demi qu’ils étaient prêts et leur accueil a été à la hauteur de cette longue attente. Avec une simplicité et une sincérité qui n’en finissent plus de déconcerter mes parents, ils m’ont immédiatement intégré dans leur fratrie, m’embrassant à l’infini et ne cessant de me répéter ces mots que je ne me lasse pas d’entendre : « Je t’aime ».
Mes frères : vous êtes mes cadeaux. Pendant les cinq mois de ma première vie, je rêvais d’une famille. Mais même dans mes rêves les plus fous, je n’avais jamais imaginé que la Vie m’offrirait un tel cadeau. Je vous aime !
Voilà, ma chère Marie, l’histoire très résumée de mes deux vies en à peine un an. Je suis aujourd’hui, comme toi, très gâté par la Vie et je compte bien profiter à fond de cette chance. Mais les plus chanceux, ce sont mes parents et mes frères car je leur réserve une vie remplie d’Amour et de joies simples. Ils peuvent compter sur moi !
Vive la Vie ! Vive l’Amour ! Vive la différence !
Augustin (sous la plume de mon papa Tanguy)
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Chères Marie et Marie-Garance, Chers Clotilde et Nicolas,
Nous reprenons la plume des mains de notre petit Augustin pour vous remercier d’avoir témoigné de votre aventure avec Marie au travers de votre livre « Tombée du nid », ce qui nous aura beaucoup aidés sur le chemin qui nous a menés à notre cinquième fils.
Nous avons en effet découvert et lu (une seule nuit aura suffi) « Tombée du nid » alors que nous venions d’entamer les premières démarches en vue de l’adoption d’un enfant extra-ordinaire. Mais même si notre décision était prise et qu’elle avait été mûrement réfléchie, nous continuions à avoir des craintes et des interrogations : pourquoi cette envie inexplicable d’accueillir un enfant différent ? Étions-nous des illuminés ? Étions-nous totalement inconscients de ce à quoi nous nous engagions ? Ne prenions-nous pas le risque de « mettre en danger » notre couple ou le bien-être de nos quatre merveilleux garçons ?
Si votre témoignage nous a bouleversés et beaucoup fait pleurer (eh oui, nous sommes très sensibles dans la famille), il nous aura surtout permis d’être rassurés et de lever nos doutes sur toutes ces questions que nous nous posions sans pouvoir trouver de réponses.
En effet, grâce à « Tombée du nid », nous avions subitement devant nous la preuve vivante que notre projet d’adoption n’était pas une douce folie qui serait uniquement réservée à des super héros. Non, rien de plus normal que la famille Noël (et ce n’est pas une insulte) : pas des illuminés ayant abusé de produits hallucinogènes, pas de grands naïfs éloignés des réalités de la vie, pas des extraterrestres dotés de pouvoirs surnaturels… Non, juste une famille de notre temps, bien dans ses baskets et ayant de l’amour à revendre !
Finalement, nous n’étions pas plus fous que vous, et sans le savoir, vous nous avez permis de ne pas avoir peur et d’aller au bout de notre désir d’adoption.
Certes, cela ne nous empêchera pas à l’avenir de rencontrer les difficultés inhérentes au fait d’avoir un enfant différent. Mais grâce à l’Amour et au bonheur que nous apporte Augustin, nous y ferons face. Nous savons aussi que nous ne sommes pas seuls et que, comme nous, d’autres parents se sont remémorés les paroles de Jean-Paul II : « N’ayez pas peur ! ».
On vous embrasse tous.
Tanguy et Laetitia